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Magazin'Art
Yvon St-Aubin DE LA GUITARE AU PINCEAU
Yvon St-Aubin fait de la peinture depuis à peine dix ans et déjà il se taille une place enviable dans une nouvelle génération de peintres figuratifs dont les parcours sont tout aussi singuliers les uns que les autres.
C'est un homme plein de contrastes : un musicien qui passe à la peinture...; pis encore : un rocker qui peint figuratif; un jeune citadin de souche qui s'entiche des scènes de Charlevoix ; un artiste à la fois musicien et peintre qui joue encore régulièrement au hockey... Contrastes aussi dans sa peinture où des percées de lumière intense tranchent sur des couleurs très vives; où des montagnes sombres font ressortir des cieux multicolores et rendent plus frappants des bouquets de couleurs « junkies » : rouge, vert, rose, jaune ou bleu; où une bonne composition et un dessin très sûr vous donnent un tableau frais, comme sans manière, qui semble sorti de la main d'un enfant de talent, passant sans façon sur nombre d'éléments mais permettant candidement à quelques petits détails anodins comme une échelle, une fenêtre, ou une fleur de nous faire un clin d'œil coquin.
Dans la force de l'âge, la jeune quarantaine, c'est un intuitif, quelqu'un qui fonctionne toujours et encore avec intensité et passion. Comme dans le film Les Boys, il joue encore au hockey régulièrement dans une ligue entre amis - même si ce sport lui semble de plus en plus dur pour son dos; mais aussi, il peut peindre sans arrêt jusqu'à douze heures d'affilée. C'est la même fougue qu'il avait d'ailleurs dans sa première passion avec des prestations interminables le soir et la nuit dans les bars, les cabarets ou dans des spectacles occasionnels.
Tout jeune, ses goûts vont à la musique. Mais contrairement à beaucoup d'ados qui se lancent dans la musique, il était studieux mais excessif : tout en poursuivant son secondaire, il fait du théâtre, mais surtout, il fait trois ans d'études, par ses soirs, à l'école Vincent-d'Indy à Montréal. II étudie la musique « pour savoir comment ça marche » mais sans se fixer sur un instrument en particulier. Finalement, il tombe amoureux de la guitare : il lui arriva même de donner un concert de guitare uniquement avec des pièces de Bach et de Mozart...
Fasciné cependant par la musique du groupe Offenbach, il se lance dans le rock. II fait partie de plusieurs groupes rock, à la petite semaine, comme « Outrage », « Week-End » et « Distance ». Comme un certain nombre de jeunes artistes à l'époque, il vit en commune pendant deux ans dans une maison à la campagne à « tripper » avec ses copains musiciens. C'est la bohème; mais quand il rencontre sa femme, il sent le besoin d'ajouter « quelques cordes à sa guitare » et commence à tâter de la peinture tout en continuant son métier de guitariste.
Gars de la ville, ses contacts avec la nature l'ont fasciné. II découvre Charlevoix avec ses paysages époustouflants mais aussi sa confrérie d'artistes de tous âges et d'expériences tous azimuts. Avec son profil un peu hippie de guitariste rocker, il ne tarde pas à s'intégrer à ce milieu. Mais il se rend rapidement compte que la peinture, comme la musique, ça s'apprend. Avec un vieux pro comme Marcel Fecteau et des amis comme Clarence Bourgoin et Mario Beaudoin, il se met à l'apprentissage du dessin toujours avec sa passion et son intensité habituelles. C'est en faisant la chasse aux croquis avec ses mentors et autres chasseurs de paysages qu'il apprivoise son nouveau métier.
Rapidement, la région de Charlevoix devient, comme il dit, « sa cour de récréation ». Et peu à peu, à mesure de ses progrès, la peinture prend le pas sur la musique. En saison, il peint sur le motif tout en noircissant cahier sur cahier de croquis au crayon. Mais il fait du croquis en toute saison et de façon intensive. Cependant ses croquis ne comportent jamais de couleur : « la couleur, c'est à moi, à mon imagination, à ma fantaisie ». II note date et endroit même si le croquis a pris des libertés sur le paysage dessiné. II note aussi sur son dessin une émotion, une atmosphère ou une circonstance : ces détails lui serviront pour inscrire au dos de chacune de ses toiles un petit mot, une anecdote ou une mise en situation pour celui ou celle qui possédera le tableau : pour Yvon St-Aubin, chaque œuvre doit pouvoir contenir un message plus personnel pour l'acquéreur. II a besoin de cette dimension humaine dans le contact avec ses admirateurs aussi bien qu'avec les gens et les artistes de la région. C'est peut-être à cause de ces attitude chaleureuses que les gens de Charlevoix l'ont adopté comme un peintre de la place. L'association touristique de la région a choisi une de ses peintures pour illustrer la couverture de son Guide touristique pour l'année 2002. Toute une marque d'appréciation et d'amitié.
II se prête facilement d'ailleurs à faire des démonstrations pour le plus grand plaisir des gens qui se baladent dans les rues de Baie-Saint-Paul et il aime bien faire la causette avec eux. Un jour qu'il peignait une toile à la porte d'une galerie, un Montréalais qui voulait la peinture retarda son départ jusqu'en fin de journée afin de pouvoir repartir avec le tableau. Comme Yvon St-Aubin ne peint qu'à l'huile avec de bons empâtements, ce fut avec de grandes précautions et aux risques du client que la toile fut installée dans sa voiture, le soir venu.
Depuis ses débuts, Yvon St-Aubin n'a participé qu'à quelques expositions de groupe et encore c'était dans sa région, où il était connu comme musicien; il a fait aussi une ou deux expositions solo sur invitation. Le hic, c'est que malgré une production pourtant suffisamment abondante, il ne réussit pas à accumuler assez de toiles pour constituer une vraie exposition. Peut-être est-ce dû au fait que ses œuvres sont encore à un prix très abordable et qu'il peint des formats qui plaisent : 24 x 30 po. - 30 x 36 po. et aussi un format plus original et audacieux le 8 x 36 po. Mais ce ne sont certainement pas les seuls facteurs.
Son aventure en peinture, c'est comme une histoire d'amour entre lui, la nature et son public : il parle de Charlevoix comme un amoureux parle de sa dulcinée. Il la fréquente avec assiduité et la croque avec avidité. II se désole que les visiteurs de la région ne se donnent pas la peine de s'écarter des grandes routes pour aller découvrir les merveilles de I'arrière-pays qui est le berceau de nombreuses familles québécoises. II se donne presque la mission de réincarner, par son regard et son pinceau, cette nature si paisiblement habitée, pour des yeux qui n'ont plus le loisir d'explorer et qui ne savent plus voir par eux-mêmes, habitués qu'ils sont de se laisser nourrir par les images trafiquées et éphémères de leur petit écran.
Yvon n'est pas un grand théoricien ni un personnage flamboyant. C'est un homme qui se donne la peine, en pein¬ture comme en musique, de bien faire ce qu'il fait et de le faire avec passion et audace. Son regard sur les paysages qu'il peint lui permet de saisir des char¬mes secrets que seul un œil amoureux peut découvrir et traduire sans préten¬tion. II ne se laisse pas impressionner par les grands noms qui ont immortal¬isé ces magnifiques paysages. II s'ingénie à découvrir des angles et des lumières inédites pour nous redonner le goût d'apprécier des toiles parce qu'on les aime et non pas parce qu'on se sent forcé de s'incliner devant la perfection de leur rendu ou la réputation de celui qui les a signées.
Paul Moore
Il se lance dans un projet de fresque pour le hall de l'hôtel de ville de Valleyfield en intégrant dans une murale les peintures d'une douzaine de jeunes concitoyens recrutés dans les écoles avec de petites annonces dans les journaux. C'est aussi un homme qui a réappris à voir et à apprécier la nature.
Yvon Saint-Aubin est représenté par les galeries suivantes : Da-Li Gallery, D.S.L., Drummond, NB; Beauchamp & Beauchamp, Québec; Chase Creation, Beaconsfield; Galerie d'art Mont-Shefford, Canton Shefford; Galerie d'art Beauchamp, Baie-Saint-Paul,; Galerie Saint-Césaire, Saint-Césaire. Il est inscrit dans le Répertoire biennal des artistes canadiens en galeries publié par
MAGAZIN'ART.
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